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dijous, 5 de març del 2009

Le surprenant succès du LKP, objet politique non identifié


"Les Isles de La Guadaloupe de Marie Galante, de La Désirade, et Celles Des Saintes: Colonie Françoise dans les Antilles". Desiné par Rigobert Bonne (1729-1795) pour l'"Atlas de toutes les parties connues du globe terrestre" de Guillaume Thomas Francois Raynal (1713-1796). Publié à 1780 Geneve. http://www.liberation.fr/politiques/0101472560-le-surprenant-succes-du-lkp-objet-politique-non-identifie

Outre-mer. Comment le collectif guadeloupéen est devenu un acteur incoutournable.

ÉRIC FAVEREAU et ANTOINE GUIRAL

 

Trois lettres qui ont changé la Guadeloupe et donné des sueurs froides à Paris depuis six semaines. LKP pour Liyannaj kont pwofitasyon («union contre l’exploitation outrancière») est un collectif qui regroupe 49 partis, syndicats, associations… Il puise sa force dans ce lien (liyannaj) établi entre les milieux culturels, politiques, syndicaux, associatifs (défense de l’environnement, aide aux plus défavorisés…). Nombre de petits chefs d’entreprise ont aussi soutenu ouvertement le LKP. «C’est cela qui a tout changé. Quand on voit les gens du LKP, c’est la Guadeloupe, toute la Guadeloupe. Il y a des professeurs, des gens du bâtiment, des agriculteurs, des employés municipaux, des syndicalistes. On a l’impression de se voir», explique Servais Vilovar, directeur d’un centre de formation à la retraite.

 

Le LKP est-il indépendantiste ?

A aucun moment la thématique de l’indépendance n’a été soulevée par le collectif. Elle ne figure pas dans la plateforme en 120 points rédigée par le LKP et remise au préfet de la Guadeloupe. La question de l’indépendance reste un véritable chiffon rouge pour une majorité de Guadeloupéens favorables au maintien du lien avec la métropole et ses subsides. Il n’était donc pas question de se couper d’une partie de la population en évoquant l’indépendance ou même une autonomie élargie de l’archipel. Le LKP compte pourtant en son sein nombre de formations ouvertement indépendantistes ou autonomistes. A commencer par l’UGTG - le premier syndicat de l’île, indépendantiste et considéré comme «dur et radical» par l’Etat. Son secrétaire général, Elie Domota, est directeur général adjoint de l’ANPE et porte-parole du LKP. Pour Rozan Mounien, ex-secrétaire général de l’UGTG et figure du LKP, «il ne faut pas prendre la place des gens. Le LKP est un mouvement démocratique dont la préoccupation du moment n’est pas l’indépendance. Cette question sera peut-être la prochaine. Le cadre juridique et institutionnel, le peuple sait à quel moment le choisir pour assumer son destin».

 

Le LKP veut-il se transformer en parti politique ?

C’est la grande crainte des responsables politiques locaux de tous bords. Très discrédités dans la population, ils soupçonnent le LKP de vouloir chercher des débouchés politiques dans les urnes à l’occasion des élections régionales de 2010. Une hypothèse exclue, pour l’heure, par Elie Domota : «Moi, je n’ai aucune intention de faire de la politique, je le dis et je le répète, cela ne m’intéresse pas du tout.» Et ne voit pas comment le LKP pourrait être «récupéré puisqu’il y a toutes les représentations politiques en son sein». Mais il reconnaît que «le LKP a vocation à durer» : «Peut-être d’une autre façon, moins visible, avec des groupes de travail, on verra…»

 

Comment fonctionne le LKP ?

«A l’automne, on s’est vus, comme on se voit tous les ans, raconte Elie Domota. Et d’ordinaire, on n’est jamais d’accord. Là, cette fois-là, il y a eu comme un déclic. En trois heures, on est tous tombés d’accord sur la plateforme. C’est que cela devait être le bon matin.» Le visage du LKP est incarné par Elie Domota. Cet homme calme et déterminé a acquis au fil des semaines une aura qui ne lui monte guère à la tête. Le collectif dispose d’un imposant service d’ordre et de militants de choc qui durant six semaines ont contraint les magasins à baisser rideau. Rompus aux conflits longs, les syndicats dominent au sein du LKP. Mais la voix des associatifs est aussi écoutée. Notamment celle de l’ensemble musical Akiyo, très populaire dans l’archipel. Dans les négociations,«Elie Domota a un rôle essentiel, c’est lui qui parle et répond presque tout le temps», assure le préfet. Un des deux médiateurs envoyés par Paris raconte : «En arrivant, on nous disait qu’il fallait contacter des gens qui étaient les conseillers de l’ombre du LKP. C’était bidon. Face à nous, on avait vraiment les vrais négociateurs.»